On ne les choisit pas, pourtant, ils posent les bases de notre identité.
Parents autoritaires. Complices. Irresponsables. Amis. Géniaux. Encourageants.
Parents toxiques.
Notre époque est si prompte à attribuer un tel qualificatif. Mais qu’en est-il vraiment ? Quand un parent bascule-t-il de sévère, irresponsable ou capricieux, à “toxique”, et comment se reconstruire après une relation parentale abusive ?
Parent toxique, relation toxique
Qu’est-ce qu’une relation toxique ?
Toxique. “Produit ou substance nocifs pour l’organisme”.
La toxicité s’identifie aisément lorsqu’elle se réfère à des entités matérielles ; facile de constater que tel produit est mauvais pour le corps. Mais lorsqu’on se réfère à des choses aussi abstraites qu’une personne ou qu’une relation, elle mérite d’être mieux définie.
Car disons-le : une personne qui nous blesse, et est donc nocive à un instant T, n’est pas pour autant toxique. Ce qui constitue la toxicité, c’est la banalisation de l’insécurité et des violences physiques ou psychologiques répétées ; là où la peur, l’inconfort et l’abus deviennent une norme, là est la toxicité.
Psychologie de la relation toxique
La personne toxique (PT) est incapable de se responsabiliser et de se contrôler. Immature émotionnellement, incapable de se détacher des règles héritées dans l’enfance, elle culpabilise de ne pas parvenir à s’y conformer. Cette culpabilité et colère contre elle-même, la PT refuse de l’embrasser et se noie dans le déni, ce qui fait d’elle un individu en grande dualité intérieure.
Ainsi, puisqu’elle ne peut contenir ses pulsions, la PT les décharge sur l’autre, dont elle se sert comme exutoire à sa rage, ce qui lui permet d’apparaître structurellement calme en société. Dans cet autre qu’elle choisi, la PT projette la partie d’elle-même qu’elle méprise, mais pour laquelle elle refuse de se responsabiliser, et continue d’évoluer dans l’illusion d’être le bon enfant que l’on attendait qu’elle soit, vivant d’une morale absolue aux multiples bienfaits.
Un effet miroir, en somme : la personne toxique accuse l’autre de ses propres déviances.
Lorsqu’un tel individu devient parent, il fait alors de son enfant cet autre sur lequel il projette. Une perversion d’autant plus profonde qu’elle conjugue différent facteurs : la relation biaisée du toxique à ses propres parents, son manque d’unicité intérieure et sa projection sur un être qui est, à l’origine, littéralement dépendant de lui.
Les types de parents toxiques
Le parent toxique est polymorphe. Voici différents profils (liste non-exhaustive) qu’il peut revêtir.
Il voit dans son enfant une extension de sa propre personne, lui niant son individualité et son droit de vivre par lui-même. Mécanique de culpabilisation, tentative de posséder l’autre, dévalorisation, le toxique perfectionniste souhaite isoler son enfant afin d’en faire un être dépendant pour toujours. “Personne t’aimera jamais comme moi.” Il refuse que son enfant vive sa propre vie et aille dans le monde réaliser ses rêves.
Il se positionne toujours comme le concurrent de son enfant. C’est le cas, entre autres, des mères qui voient leurs filles comme des rivales, pouvant aller jusqu’à les embarrasser publiquement pour se démarquer. Le toxique compétitif est un parent peu affectueux, voire pas du tout.

Se libérer d'un parent toxique
Reconnaître la relation toxique
La relation toxique repose sur trois grands piliers :
Le profil d’un enfant de parent toxique
L’enfant d’un parent toxique rencontre des difficultés dans sa vie intérieure et relationnelle. Rongé par une culpabilité injustifiée, il nourrit une très mauvaise image de lui-même. Manquant souvent de personnalité, timide, il témoigne de difficultés à exprimer ses sentiments et à embrasser sa personnalité dans toutes ses dimensions ; ses qualités, il ne les voit pas, ses défauts, il en a honte, tente de les cacher, mais ne voit que ça. Obsédé par l’idée de plaire à tout le monde, effrayé par les gens et leur jugement, il se sent responsable du bien-être des autres. Pour lui, l’amour est méritoire, et lui ne le mérite pas ; il évolue donc dans une logique de rachat perpétuel, où sa seule raison d’exister est de conquérir l’intérêt et l’affection de tous. L’enfant de parent toxique se punit en niant ses propres envies et en s’obligeant à faire un tas de choses qu’il n’aime pas. Perfectionniste, il complique tout inutilement, frustré par la certitude d’être incapable de satisfaire quiconque. Dans des cas plus rares où la toxicité était plus intense et violente, ces dimensions s’expriment avec une plus grande intensité, pouvant jusqu’à paralyser la vie de la “victime”.
Se libérer de la relation toxique
Voici trois clés pour se libérer de l’emprise de parents toxiques.

La reconstruction est possible ; la vie, c’est l’espoir. Il n’y a pas de fatalité. La relation avec les parents n’est jamais évidente et nous construit de bien des façons, mais de multiples perspectives existent à l’extérieur de la cellule parentale.
Lectures sur le sujet
S.Forward, Parents toxiques: Comment échapper à leur emprise, Poche, 2013
A-L Buffet, Les prisons familiales: Se libérer et guérir des violences invisibles, 2019