Que faire de ses émotions ?

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Comprendre ses émotions : pour mon tout premier article, je choisis ce sujet, plus fascinant qu’il n’en a l’air. C’est sûr, dit comme ça, ça vend moins de rêve que de lancer un « hey, salut, et si je t’aidais à analyser les gens ? ». Pourtant, c’est promis, les émotions font un sujet passionnant qui pose la base de tous les autres. En fait, si aujourd’hui elles nous laissent si indifférents, c’est qu’on est persuadés de les connaitre ; erreur ! Car ce qu’elles sont véritablement est peu connu, et pour causes : on les confond avec tout. Les sentiments, les sensations, les pensées, les humeurs ; on a même intégré ces confusions dans notre vocabulaire usuel. J’aimerais poser les bonnes bases en expliquant ce qu’elles sont, mais surtout ce qu’elles ne sont pas.
Colère, tristesse, joie, peur, surprise et dégoût ; voici ce que j’ai appris sur les émotions humaines.

Qu'est-ce qu'une émotion ?

Lorsque quelque chose se produit dans notre vie, une réponse immédiate, automatique et spontanée se forme en nous : l’émotion, une réaction intérieure à un événement extérieur.
Il y a six façons universelles de réagir à un stimulus extérieur ; un panel de six émotions universelles.
Ça, c’est pour la définition.

Maintenant, ce qu’il faut savoir, c’est qu’en elles-mêmes, les émotions sont neutres : ni bonnes, ni mauvaises. Elles peuvent être désagréables – c’est le cas de la tristesse ou de la colère-, mais n’ont pas de valeur morale puisqu’elles sont subies et non pas choisies. C’est ma réaction à mon émotion qui possède une charge morale, car elle est le fait de ma volonté, j’engage ma responsabilité. En bref, si je suis en colère, c’est neutre, mais si je tue quelqu’un parce que je suis en colère, c’est mal.

À quoi sert une émotion ?

Premier point, de la plus haute importance : les émotions sont instinctives, et parlent donc… de nous-même. Une sorte de langage intérieur qui donne des informations sur des choses du passé et sur la façon dont on s’est construit. Car si certains évènements éveillent des émotions universelles (la mort provoque la tristesse, par exemple) la façon dont on les accueille en dit généralement plus sur nous-même que sur l’évènement : si je suis triste parce que ce qu’on me dit me blesse, ma tristesse en dit plus long sur moi que sur celui qui m’a blessé. De même, si j’entends un bruit le soir et que j’ai peur, ma peur n’explique pas le bruit, mais révèle que dans mon passé, quelque chose s’est produit et m’a fait associer bruit nocturne et danger.

Deuxième point, et non des moindres : les émotions servent à retrouver notre état originel.
En fait, il existe des désaccords sur la joie en tant qu’émotion, qui en serait une sans vraiment l’être. Car la joie s’assimile plus à notre état par défaut, celui pour lequel nous sommes « programmés ». Ainsi, toutes les autres émotions ne serviraient qu’à la restaurer en nous signalant dune problématique intérieure. Comme les douleurs physiques qui alertent d’un dysfonctionnement du corps, les émotions – langage de l’âme – indiquent un décalage intérieur. Tristesse et colère nous disent « si tu n’accueilles pas cet événement avec joie, c’est que quelque chose ne va pas : tu dois identifier ce que c’est, et guérir ça. ».

Lequel de ces visage exprime une joie authentique ?

Ce que n’est pas une émotion

Les émotions ont un sens, elles servent un but ; c’est pourquoi les confondre avec d’autres choses est dangereux. Tout d’abord, les émotions ne sont pas des pensées. Les pensées, ce sont des concepts mentaux : ça se passe au niveau de la tête, ce sont des images qui se forment, des idées qui s’associent, des mots qui résonnent. Alors on retient : émotions ≠ pensées.

Ensuite, les émotions ne sont pas des sensations. La nuance est plus compliquée, car les deux sont liées. En fait, les sensations sont les conséquences des émotions. Le cœur qui s’accélère, les poils qui se hérissent, les joues qui rougissent, la sueur coule sur mon visage : tout ça, ce sont des sensations produites par une émotion.
On mémorise : émotions  ≠ sensations.

Troisièmement, les émotions ne sont pas des humeurs, car les émotions sont rapides, furtives, à peine conscientisées. Elles sont adaptatives, pour une réaction à chaud, sans se poser de question. Au contraire, les humeurs s’étendent sur la durée : ce sont des émotions qui ont perdu en intensité et se sont étirées dans le temps. C’est ce qu’il se passe dans les cas de rupture ou de deuil, par exemple : l’évènement qui a déclenché l’émotion de base dure plusieurs mois- années-, et transforme l’émotion en humeur.
Répétons : émotions  ≠  humeur.

Enfin, les émotions ne sont pas non plus des sentiments. C’est la confusion la plus fréquente, puisqu’elles s’entremêlent : quand on a des sentiments, on passe par toute sorte d’émotions. Et quand on a trop d’émotions, on développe des sentiments.
Petite astuce, donc, pour les différencier : les émotions sont immédiates, instantanées, temporelles, limitées, brutes, et n’évoluent pas. Les sentiments sont un état affectif long terme et évolutif : ils naissent, grandissent et parfois, ils meurent.

Petite anecdote – pas des plus avantageuse- pour résumer le tout : quand j’étais petite, un ballon m’a explosé au visage et j’ai eu vraiment très peur (émotion). J’ai donc développé une phobie absolue des ballons, des pétards, des feux d’artifice, bref de tout ce qui serait susceptible de me faire revivre cette expérience (non, on ne juge pas.) Ce qu’il s’est produit, c’est que j’ai développé un sentiment d’insécurité à la seule vue d’un objet qui pourrait m’exploser au visage : je ferme instinctivement les yeux et mon corps se crispe chaque fois que j’en vois un (sensation).

Décrypter les émotions

La colère 

Nous avons tous des choses qui comptes pour nous : elles sont matérielles ou conceptuelles (nos valeurs), et lorsqu’elles sont menacées, la colère s’éveille. Un mécanisme naturel, qui nous pousse à défendre ce qui est important pour nous. C’est également le cas lorsque l’on sent que notre espace personnel est envahi.

Physiquement, ça se traduit plus ou moins comme ça : notre énergie se concentre, notre corps se crispe, et notre cœur bat plus vite.

La tristesse 

Cette émotion favorise l’introspection. Son intériorité semble plus prononcée que les autres. Elle est un repli nécessaire pour intégrer une information douloureuse, indique qu’il faut prendre du recul sur soi et ce qu’on vit pour trouver de nouveaux repères et reprendre le cours de son quotidien C’est donc une émotion particulièrement importante à décrypter, car correctement accueillie, elle donne une nouvelle impulsion à notre existence.

Physiquement, la tristesse se traduit par un ralentissement du rythme corporel : on est mou,

La peur

Cette émotion avertit d’un danger réel ou imaginaire, et s’accompagne de 3 stratégies de protection : la fuite, l’attaque et la sidération.

Physiquement, la peur se traduit par un afflux de sang dans les muscles (pour courir plus vite, avoir plus de force…), par une montée d’adrénaline (pour augmenter la puissance) et une accélération du rythme cardiaque (pour préparer à l’effort).

La joie

Cette émotion survient en contexte favorable au bien-être, et alimente le plein potentiel.

Physiquement, elle se traduit par la sécrétion d’hormones du plaisir (ocytocine, endorphine…).

La surprise 

Cette émotion prépare à un changement. Elle est particulière, son rôle est transitoire : elle s’efface rapidement pour laisser place à une autre émotion.

Physiquement, elle se traduit par une mobilisation rapide des neurones pour permettre un élargissement des champs visuels et auditifs.

Le dégoût 

Appelé aussi mépris, cette émotion a pour but de nous protéger en rejetant ce qui est mauvais pour nous.

Physiquement, elle se traduit par une sensation de nausée, et une grimace plus ou moins discrète.

Qu’est-ce que les émotions secondaires ?

Nos 6 émotions primaires sont innées. Toutefois, il existe des émotions secondaires. Elles sont influencées par notre histoire, notre culture, notre entourage, bref, socialement influencées. Toute émotion secondaire fonctionne en paire avec une émotion primaire. La culpabilité, par exemple, fonctionne avec la colère (colère contre soi-même), et la jalousie avec la peur.

Comment identifier les émotions ?

Les émotions sont identifiables par les expressions faciales : elles commencent par un mouvement de muscles faciaux quelques millièmes de seconde à peine après l’événement déclencheur. Je ferai un jour un article sur les micro-expressions, car Paul Ekmann, celui qui a inspiré la série Lie to me,  y a consacré beaucoup d’ouvrages, et c’est passionnant ! 
Viennent ensuite les réactions physiques en réponse à émotion donnée : afflux de sang au visage, accélération du rythme cardiaque, mains moites, etc. Il est aussi possible d’écouter l’expression verbale utilisée et d’en analyser les émotions cachées. Dans un «je ne me sens pas en sécurité », l’émotion induite, c’est la peur. Derrière un « je n’ai pas envie de… » il y a souvent la peur, aussi. Car l’envie n’est pas une émotion, c’est un mouvement de la volonté vers un objet qu’on identifie comme bon (je sais que le sport est bon pour la santé, je veux ce qu’il y a de bon pour moi donc j’ai envie de faire du sport.)

S’il n’y avait qu’une chose à retenir, ce serait celle-ci : identifier les émotions est très important pour nous-même. C’est un travail de réparation et de guérison intérieure en répondant à la problématique posée, mais c’est aussi un élément clé de nos relations aux autres, surtout en amour. Combien confondent émotion et amour ? Disent « je me sens bien avec lui/elle » et croient aimer ? Sous un « je me sens bien », il y a bien souvent un « je me sens en sécurité avec… », qui signifie que l’autre vient soigner une peur…un travail que nous-même devrions faire. C’est pour ça que les émotions sont là, pour nous conduire vers des relations saines, vers la lucidité de ce que l’on vit.

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